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Chez Fifi

On trouve de tout ici, suivant mon humeur. De la création plus ou moins littéraire, de la politique (dans un sens relativement large), de la vie quotidienne, des réminiscences du passé. Parfois c'est tellement long que c'est en plusieurs parties. J'aime le mélange de genres, donc on est en droit de s'attendre à tout. Enfin, c'est à espérer...

Erysipèle mon amour

Publié le 3 Février 2017 par Fifi in Au jour le jour

"I got elastic bands keeping my shoes on
Got those swollen hand blues. " (Roger Waters, "Nobody home")

"When I was a child I had a fever
My hands felt just like two balloons
Now I've got that feeling once again
I can't explain, you would not understand
This is not how I am
I have become comfortably numb " (Roger Waters, "Comfortably numb")

 

Amis des concepts inattendus et des coïncidences foireuses, bienvenue!

 

J'ai un érysipèle. Là, aujourd'hui. Et hier, aussi. En fait depuis lundi. Lundi après-midi, pour être précis. Ca a commencé par une grosse fièvre, je tremblais comme un malade, une très grosse fatigue aussi.

Au début, j'ai mis ça sur le dos des 3h de jeux de grilles du Grand Prix de la World Puzzle Federation que je venais de m'enquiller, mais comme ça ne partait pas, j'ai pensé à la grippe. J'ai fait venir un médecin avec l'idée de choper un arrêt de travail, histoire de me reposer tranquillos à la maison et de laisser passer la maladie. Mais ce con n'a rien vu, pas convaincu par les différentes options, grippe, gastro-entérite, appendicite. Ce qui montrait bien, au passage, qu'il n'avait pas lu mon blog (voir "Limbes du jour"), et il est parti sans beaucoup plus d'informations.

Mais le mercredi, j'ai vu que la jambe était devenue rouge, brûlante, et ça m'a rappelé des souvenirs: C'était un érysipèle! Ah ben, ça faisait longtemps, tiens.

 

La dernière fois, c'était en 1994. J'étais jeune, insouciant, et je ne me laissais pas emmerder par une maladie, de la fièvre, ou de quelconques jambes traînantes ou rougeaudes. La fièvre, c'était la vie, le rock'n'roll, et je n'allais pas consulter un médecin pour si peu.

En plus, j'étais en DEA, j'avais un partiel sur un sujet que je maîtrisais pas mal et qui m'éclatais pas mal parce que ça faisait très jeu de logique.

Et puis, surtout, il y avait un week-end prévu à Paris juste après. C'était important pour moi, à cette époque, les week-ends à Paris, sans doute parce que je n'y habitais pas, et puis pour d'autres raisons un peu hors sujet et trop longues à développer (et développées dans un blog à l'époque ou ça ne s'appelait pas blog, mais même pas ici, alors vous vous faites bien rouler, mais peu importe). Et puis, il faut bien reconnaître, en 1994, les vraies raisons profondes de mon goût pour les week-ends parisiens, elles avaient carrément pris du plomb dans l'aile, parce que justement j'en avais un peu trop abusé (pour être poli).

Enfin bref, qui a besoin d'un médecin?

Sauf que le jour où je n'ai pas pu du tout me lever de mon lit, je me suis retrouvé embêté. Parce que là, du coup, c'était moins rock'n'roll. On est venu me chercher en brancard, urgences, hôpital, deuxième hôpital, et ce toujours allongé, sans avoir vraiment mal, parce que tant qu'on est allongé, tout va bien. Mais bon, comment dire? On se fait pas mal chier, quand même.

Et puis j'ai raté mon partiel de DEA (heureusement rattrapé), et mon week-end (heureusement rattrapé).

Mais je suis quand même rétrospectivement très content de ce moment de mon existence, parce qu'il a conduit à de gros bouleversements dans ma vie, et en particulier au début de ma relation amoureuse avec quelqu'un de très important. Alors ça valait le coup, hein.

Mais une fois, hein, ça suffisait...

Sauf que je n'avais pas compris le message.

 

Un érisypèle, pour ceux qui ne sont pas médecins, ou qui n'en ont pas eux, c'est une infection, souvent des jambes, mais pas forcément. La jambe devient rouge, irritée, gonfle si on la laisse trop souvent à la verticale...

En 1994, c'était dû à une ampoule mal soignée. Comme si j'avais une gueule à soigner mes ampoules. Rock'n'roll. Et puis, franchement, elle était toute mini. Ils ont mis une semaine à trouver le "point d'entrée", comme ils disent.

Par le point d'entrée, ben les méchants microbes ils entrent. Et puis ils font rien que des conneries, alors après ça va plus. Et si on fait rien, ça craint parce que ça remonte, et puis on est foutu. En 1994, ils m'ont dit que c'était un peu juste, au niveau timing. Ca m'avait fait un peu réfléchir, et changé ma vision de la vie, il faut bien le reconnaître.

 

Le premier round du Grand Prix de Jeux de Grilles de la WPF était divisé en trois parties d'une heure chacune. Pour des raisons de planning un peu chamboulé, il a fallu que je fasse les trois parties quasiment à la suite. A la fin de la deuxième partie, j'ai trouvé que je n'étais plus trop en forme, mais il fallait continuer, je n'avais plus le temps de faire une grosse pause. Juste après avoir envoyé l'impression, j'ai commencé à être pris de tremblements étranges. Merde, trop tard, le compte à rebours était déjà commencé.

J'ai donc fait la dernière heure pris de soubresauts et de délires fiévreux. Et moi, je vous le dis, écrire et réfléchir avec une main qui tremble et la fièvre, et ben c'est pas si facile. Ou bien? Allez comprendre, sur cette épreuve-là, j'ai fait le meilleur score français.

Le jeu de grille que j'ai attaqué en premier, celui pour lequel ma main était franchement incontrôlable, a pour dénomination anglo-saxonne (c'est mondial, donc c'est beaucoup en anglais) "Elastic bands". J'ai choisi de commencer par ça, parce que j'aime bien, parce que c'est très semblable à ce qu'on me demandait en DEA dans le module dont j'ai raté le partiel en 1994. Mais bon, là, avec la mâchoire et la main qui tremblaient, j'ai pas pu. Certains trucs, je les ai faits carrément de tête pour gagner du temps. Rock'n'roll.

En y repensant hier, le nom "Elastic bands" m'a assez naturellement ramené à la chanson "Nobody home", chanson qui avait eu l'occasion de jouer un rôle assez important à un moment-clé de ma vie passée (voir "Amants testés"). Et là, je me suis dit "Tiens, y'a quoi dans la chanson après?" Et là, j'avoue que je me suis arrêté de bouger, ce qui n'était pas très conseillé, car j'étais exceptionnellement debout, et que debout en action, ça va à peu près, mais debout immobile, c'est des coups à gonfler le pied, et ça fait mal.

 

Aux dires de David Gilmour, et a priori c'est fiable parce qu'il dit du bien de Roger Waters sur ce coup-là, ce qui est rare, donc je doute qu'il invente, la chanson "Nobody home" a été écrite en une nuit parce que David avait fait remarquer à Roger qu'il manquait quelque chose dans "The wall". Et David de louer la "songwriting efficiency" de Roger.

Efficace, oui, mais on peut comprendre que les paroles, notamment, aient pu être quasi-improvisées. Il y a une construction intéressante, et sinon c'est surtout une énumération. Procédé que Roger Waters utilise régulièrement avec une certaine efficacité, d'ailleurs. Ca peut lui permettre de sauter du coq à l'âne, parfois parce que ça l'arrange, parfois pour feinter l'ennemi. C'est le cas ici.

Quel rapport, dans la citation donnée ici, entre les deux vers successifs cités en début d'article? Aucun, sauf si...

Sauf si Roger Waters, en 1979, avait souhaité m'envoyer un message en 1994! Tout s'explique. J'avoue, je n'ai pas compris, à l'époque. Mais aujourd'hui que "j'ai ce sentiment à nouveau", tout s'éclaire.

Au passage, deuxième illumination: Le gamin, dans "The wall"...

Ah oui, pardon, spoil. Si vous n'avez pas vu "The wall", laissez tomber la fin de ce paragraphe, passez direct à la fin.

Le gamin, dans "The wall", oui, Pink, là, qui fait le con à vouloir réchauffer son rat moribond, c'est un érysipèle, qu'il chope. Ben ouais, d'où les mains qui gonflent!

A ce moment-là, je me suis dit que c'était peut-être moins chiant d'avoir un érisypèle aux bras qu'à la jambe. Au moins tu peux bouger. Ah oui, mais ne rien faire. Et si ça se trouve, ça fait mal aussi quand tu quittes une position stable, et  tu te mets à faire "aaaaaaaaaaaaaaaah", et puis sinon tu ne bouges pas et tu te sens "comfortably numb". Oh putain, j'ai tout compris.

Erysipèle, tu es ma lumière!

 

Oui, tout s'éclaire.

Oui, enfin, sauf que je n'ai toujours pas compris le message que Roger Waters m'a envoyé à travers le temps.

Et que je me sens pas mal engourdi.

 

 

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